lunes, 10 de febrero de 2014

Le Brésil retrouve le chemin de la rue, par Janette Habel (Le Monde diplomatique)

Le Brésil retrouve le chemin de la rue, par Janette Habel (Le Monde diplomatique)



« Les manifestations pacifiques sont légitimes et propres à la démocratie… »
Le 17 juin 2013, le communiqué de la présidente brésilienne Dilma
Rousseff commentant une nouvelle journée de mobilisation populaire
feignait d’ignorer l’essentiel : jamais, depuis la fin de la dictature
en 1985, le pays n’avait connu de tels rassemblements — à part peut-être
en 1992, lorsque la population était descendue dans la rue pour
dénoncer la corruption du gouvernement de M. Fernando Collor de Mello,
précipitant sa démission la même année. Au cours de la journée précédant
la déclaration de Mme Rousseff, près de deux cent mille personnes
avaient défilé, notamment à São Paulo, Rio de Janeiro et Brasília, la
capitale, où le Congrès avait été occupé durant plusieurs heures. Ils
approcheraient le million quelques jours plus tard




Comme souvent, la nature de l’étincelle n’a que peu de rapport avec
l’ampleur de l’embrasement. Les résidents de São Paulo opposés, depuis
le 11 juin, à une augmentation du prix du ticket de bus (de 3 à
3,20 reals, soit 1,12 euro) ont en effet très vite été rejoints par
d’autres. Les uns, notamment à Rio de Janeiro, contestaient les sommes
engagées dans la préparation de la Coupe du monde de football de 2014 et
des Jeux olympiques de 2016 : au total, environ 50 milliards de reals,
soit 17 milliards d’euros, dans un pays qui demeure l’un des plus
inégalitaires du monde. A ceux-là s’est ajoutée la foule des citoyens
qu’une corruption généralisée a fini par lasser, ainsi que tous les
Brésiliens qui peinent à assurer à leur famille l’accès à des soins et à
une éducation de qualité.