José Bové -- député européen --
Espionnage par la NSA : la France doit réagir. Voici 3 leçons à tirer de ce scandale
L'ampleur des écoutes américaines opérées par la NSA depuis au moins
10 ans et révélée par Mediapart et "Libération" grâce à Wikileaks était
bien entendu un secret de Polichinelle. L'ensemble de la classe
politique française s'indigne depuis mardi soir et François Hollande
convoque ce mercredi un conseil de défense pour tenter de montrer que la
République est aux manettes et ne va pas se laisser faire.
Mais
toute cette agitation assez théâtralisée face à un comportement
scandaleux des États-Unis, qui ont écouté sans vergogne les trois
derniers chefs d'États français, y compris dans leurs échanges privés,
mais également des ministres, des hauts fonctionnaires, des
parlementaires et des diplomates, ne semble pour l'instant pas entraîner
les réponses concrètes les plus pertinentes.
Il y a pourtant trois
leçons très claires à tirer de cette séquence que non seulement les
autorités françaises, mais bien au delà toute l'Union européenne
devraient dès à présent envisager sans détour.
1. Suspendons les négociations autour du TTIP
Tout d'abord, les Américains, s'ils sont réellement des amis ou tout du
moins des "alliés", n'avaient absolument aucune raison valable de nous
espionner de la sorte durant au moins 10 ans. Or malgré les engagements
réitérés notamment du président Obama, on redécouvre aujourd'hui que
nous n'avons aucune garantie concrète qu'ils aient réellement cessé ce
type de pratique lamentable.
La première leçon de ce scandale est
donc la nécessité de remettre sur la table l'ensemble de nos relations
avec les États-Unis, et en premier lieu l'accord de partenariat
transatlantique (le si controversé TTIP) discuté actuellement entre l'UE
et Washington.
Il apparaît totalement impossible de continuer à
mener des négociations sur ce traité, susceptible de remettre en cause
une bonne partie de notre normes, avec un "partenaire" en lequel nous ne
pouvons absolument pas avoir confiance. Les raisons de stopper ces
négociations étaient d'ores et déjà nombreuses. Là la coupe est pleine.
Alors ne rajoutons pas de la couardise et de la lâcheté à l'humiliation
collective. Soyons fermes et montrons-nous dignes d'une certaine idée
et de la France et de l'Europe en disant dès aujourd'hui : "Nous
suspendons totalement les négociations autour du TTIP".
2. Refusons de copier les pratiques a-démocratiques des USA
La deuxième leçon à tirer de ce scandale est que si nous trouvons ces
écoutes américaines totalement scandaleuses, nous ne pouvons donc
absolument pas copier leurs pratiques. Hasard du calendrier, le projet
de loi français sur le renseignement tant décrié notamment par toutes
les organisations de défense des libertés publiques revient sur la table
de l'Assemblée aujourd'hui.
Alors que nous nous indignons à juste
titre du Big Brother américain, notre parlement accepterait le jour même
de valider un Little Brother français ? La protection des données et de
la vie privée sont des valeurs intrinsèques et non négociables de nos
démocraties. Si au nom de la sécurité nous commençons à renier sur nos
libertés, ce sont tous les terroristes qui auront gagné.
Là encore,
il y avait déjà d'excellentes raisons de s'opposer à ce projet de loi
sur le renseignement. Aujourd'hui, le scandale des écoutes américaines
nous oblige à refuser de copier leurs pratiques a-démocratiques.
3. Protégeons les "lanceurs d'alerte"
Enfin, la dernière leçon à tirer de tout cela, essentielle, est la
nécessaire protection des lanceurs d'alerte. C'est grâce aux révélations
de Wikileaks et de personnalités telles que Julian Assange ou encore
Edward Snowden, relayées par des médias responsables, qu'aujourd'hui le
grand public est au courant de ces écoutes américaines.
Dans tout un
tas d'affaires ayant récemment défrayé la chronique, Wikileaks,
Swissleaks, Luxleaks, c'est grâce à des individus courageux ayant décidé
de transgresser les règles et le droit positif au nom d'une certaine
idée de l'intérêt général que des pratiques scandaleuses (espionnage à
grande échelle, fraudes fiscales industrielles, blanchiment d'argent
organisé par les États eux-mêmes...) ont pu être mises à jour.
Ceux
que l'on nomme les "lanceurs d'alerte", nouveaux héros de notre époque,
prennent des risques inouïs et se retrouvent bien souvent seuls contre
tous, les grandes firmes multinationales et les États jaloux et bien
décidés à ne pas partager leurs "secrets". Ils doivent donc absolument
être protégés pour pouvoir continuer de dénoncer un certain nombre de
pratiques au nom de l'intérêt général.
C'est pourquoi nous
demandons à nouveau à la Commission européenne, qui n'a pour l'instant
pas prévu d'agir en la matière, de mettre à l'agenda de l'UE un texte
prévoyant la protection européenne de tous les lanceurs d'alerte.
Pour qu'Edward Snowden, Stéphanie Gibaud, Hervé Falciani, Irène Frachon,
Julian Assange et tous les actuels et futurs lanceurs d'alerte de leur
trempe puissent continuer à révéler ce type de scandales qui doivent
être connus du grand public afin que le terme même de "démocratie"
puisse encore avoir un sens, il faut qu'ils soient protégés par nos
institutions, et non inquiétés, poursuivis et précarisés comme trop
d'entre eux le sont aujourd'hui.
Tribune de Yannick Jadot,
Michèle Rivasi, Karima Delli, Pascal Durand, Eva Joly et José Bové,
membres de la délégation Europe Ecologie au Parlement européen
...............................
NSA Spying: France must react. Here are three lessons from this scandal
The extent of American plays made by the NSA for at least 10 years and
revealed by Mediapart and "Liberation" with WikiLeaks was of course an
open secret. The entire French political class is indignant since
Tuesday evening, Hollande convene this Wednesday a defense counsel in an
attempt to show that the Republic is in control and will not let them.
But all the fuss
enough theatrical face outrageous behavior of the
United States, who listened shamelessly the last three French heads of
states, including in their private exchanges, but also ministers, senior
government officials, parliamentarians and diplomats, seems to far not
lead the most relevant concrete answers.
There Yet three very clear
lessons to be learned from this sequence that not only the French, but
far beyond the whole European Union should now consider without detour.
1. Suspend negotiations on the TTIP
First, the Americans, if they are really friends or at least "allies"
had absolutely no valid reason to spy on us in this way during at least
10 years. Yet despite repeated commitments including President Obama,
today we rediscover that we have no concrete guarantee that they
actually stopped such lamentable practice.
The first lesson of this
scandal is the need to put on the table all of our relations with the
United States, and primarily the transatlantic partnership agreement
(the controversial TTIP) currently being discussed between the EU and
Washington.
It seems totally impossible to continue conduct
negotiations on the treaty, which could call into question much of our
standards, with a "partner" in which we can absolutely trust. Reasons to
stop these negotiations were already numerous. Once the cup is full.
So do not add any cowardice and cowardice to collective humiliation.
Let us be firm and show ourselves worthy of a certain idea and France
and Europe today, saying: "We fully suspend negotiations on the TTIP"
2.. Refuse to copy the practices of the US-democratic
The second lesson from this scandal is that if we find this completely
outrageous American plays, we can not absolutely not copy their
practices. By coincidence, the French bill on intelligence including
much maligned by all civil liberties organizations back on the table of
the Assembly today.
As we rightly indignant Big Brother US, our
parliament would accept the same day to validate a French Little
Brother? Data protection and privacy are intrinsic and non-negotiable
values of our democracies. If the name of security we begin to deny
our freedoms, they are all terrorists have won.
Again, there were
already good reasons to oppose the bill on intelligence. Today, the
scandal plays American forces us to refuse to copy their
practices-democratic.
3. Protecting the "whistleblowers"
The
final lesson from all this essential is the need to protect
whistleblowers. It is thanks to the revelations of Wikileaks and
personalities such as Julian Assange or Edward Snowden, relayed by
responsible media, now the general public is aware of these American
plays.
In a lot of Business headlines recently, Wikileaks,
Swissleaks, Luxleaks, thanks to courageous individuals who decided to
break the rules and positive law in the name of a certain idea of the
public interest as scandalous practices (espionage large-scale,
industrial tax evasion, money laundering organized by the States
themselves ...) have been updated.
Those are called the
"whistleblowers" new heroes our time taking incredible risks and often
find themselves alone against all, large multinational firms and jealous
states and determined to not share their "secrets". So they absolutely
must be protected in order to continue to denounce a number of practices
in the name of the general interest.
We therefore once again call
on the European Commission, which has for the now not expected to act in
the matter, to put on the agenda of the EU text providing for the
protection of all European whistleblowers.
To Edward Snowden,
Stephanie Gibaud, Hervé Falciani, Irene Frachon, Julian Assange and all
present and future of their quenching whistleblowers can continue to
reveal this type of scandals that have to be known to the public so that
even the term "democracy" may still have meaning, it must be that they
are protected by our institutions, not worried, prosecuted and insecure
as too many of them are today.
Tribune Yannick Jadot, Michèle
Rivasi, Karima Delli, Pascal Durand, and Eva Joly José Bové, members of
the Europe Ecologie in the European Parliament delegation